Pierre Genevier

53 Rue de L’Amiral Mouchez

75013 PARIS

 

 

 

Cour Administrative d’Appel de Paris

Att. M. Pierre-François RACINE

10 rue Desaix

75015 Paris

 

                                                                                                          Paris, le 10 septembre 1999

 

 

 

Votre référence: 99EXPA 22

Référence du jugement: N° 980204. M. Genevier c/ Département de l’Essonne.

 

 

 

 

 

            Monsieur le Président de la Cour Administrative d’Appel de Paris,

 

            J’ai bien reçu votre courrier du 7 septembre 1999 m’informant du classement de ma demande d’exécution et m’apportant quelques détails sur la méthode de calcul des sommes versées.

 

Je conteste cette interprétation du jugement, maintiens que le département n’a exécuté le jugement que partiellement, et sollicite une procédure juridictionnelle pour obtenir l’exécution totale du jugement par voie d’astreinte.  Je souhaiterais d’autre part faire les remarques suivantes :

 

Concernant la méthode de calcul.

 

Vous avez écrit dans votre lettre du 7 septembre 1999: 

 

‘Je vous rappelle que, par ce jugement, le tribunal administratif de Versailles a notamment condamné le Département de l’Essonne à vous verser une indemnité correspondant à la perte de salaires que vous avez subie depuis la date de votre éviction jusqu’au terme de votre contrat, diminuée le cas échéant du montant des revenus de toute nature perçus pendant cette période et à l’exclusion de toute prime ou indemnités liées directement à l’exercice effectif des fonctions.’

 

Mais le jugement, lui, dit en page 3 :

 

‘qu’il y a lieu de condamner le département de l’Essonne au paiement d’une indemnité équivalent au montant des salaires qu’aurait touchés l’intéressé s’il était resté en fonction, diminué, le cas échéant, du montant des revenus de toute nature qu’il a pu percevoir par ailleurs pendant cette période et à l’exclusion de toutes primes ou indemnités liées directement à l’exercice effectif des fonctions et à renvoyer M. Genevier devant le département de l’Essonne pour qu’il soit procédé à la liquidation de cette indemnité dans la limite de 393 426 F ;’

 

Le jugement ne limite pas le calcul de l’indemnité par un terme comme vous le dites, puisqu’il dit ‘salaires qu’aurait touchés l’intéressé s’il était resté en fonction’, il n’est pas question de terme ou de limite dans le temps, la seule limite imposée est la limite de 393 426 F, une limite d’argent.

 

Si j’étais resté en fonction, je serais comme tous mes collègues du service des études encore en fonction  (en poste) aujourd’hui.  Ils sont presque tous contractuels aussi.

   

D’autre part, vous parlez du tableau faisant ‘apparaître précisément le montant des salaires que vous auriez du percevoir depuis la date de votre éviction, le 1er avril 1993, jusqu’au 30 juin 1994, date de l’expiration de votre contrat’.  Comment pouvez-vous (et le Département de l’Essonne) établir la  date d’expiration du contrat au 30 juin 1994, alors que le jugement fait référence à une durée indéterminée pour le contrat puisqu’il parle en page 2 : ‘Considérant que M. Genevier a été engagé par le département de l’Essonne par contrat du 20 juin 1991 et prenant effet à compter du 1er juillet 1991 sur un emploi d’ingénieur en Chef 1er catégorie au sein du service départemental, pour une durée supérieure à un an ;’.     

 

Le contrat du 20 juin 1991 contient deux durées en page deux, une durée supérieure à un an  en ligne 3 et une durée de trois ans dans l’article 6.  Si les juges avaient pensé que le contrat était un contrat de 3 ans, ils l’auraient écrit dans leur jugement.   Bien sûr, on peut mal lire ou penser que ce doit être une erreur, mais pas qu’en on est juriste et qu’on sait qu’il y a, entre autres, un article du code du travail qui assimile ce contrat à un contrat à durée indéterminée.  Il n’y a aucun doute possible, les juges ont assimilé le contrat à un contrat à durée indéterminée. 

 

L’article L. 122-1-2 qui précise ‘le contrat de travail à durée déterminée doit comporter un terme fixé avec précision dés sa conclusion.’  Note ‘Le contrat n’a pas de terme fixé avec précision lorsqu’il contient une clause de résiliation unilatérale.  Celle-ci confère au contrat une durée indéterminée quelles que soient les précisions données sur l’échéance de celui-ci.’  De plus cet article précise, au paragraphe II, que la durée ne peut être supérieure à 18 mois.  Le contrat du 20 juin 1991 n’a pas de terme fixé avec précision puisqu’il contient deux durées et une clause unilatérale de résiliation, d’autre part la durée de trois ans dépasse les 18 mois, donc le contrat est bien un contrat à durée indéterminée.

 

Toute la cohérence du jugement repose sur ces deux points.

 

Concernant les cotisations de retraite.

 

 Le département n’a, d’autre part, effectué aucun versement aux organismes de retraite.  Le jugement, du fait de la faute d’excès de pouvoir reconnue en page 2  ( ‘le président du Conseil Général de l’Essonne a commis une erreur de fait qui entache sa décision d’excès de pouvoir ;’) et de la formule de calcul de l’indemnité basée sur les ‘salaires qu’aurait touchés l’intéressé’, donne droit à la reconstitution de la retraite, c’est à dire au paiement aux organismes de retraite des cotisations de retraite comme si j’avais touché des salaires.  Il n'est stipulé nulle part dans les documents que vous m’avez transmis, que des versements aux organismes de retraite aient été effectués.

 

Si les juges avaient voulu accorder une somme d’argent simplement, ils l’auraient mis en clair comme pour le préjudice moral.  Ils ont donné une méthode de calcul basée sur les salaires pour que le département effectue aussi la reconstitution de la retraite comme il va de soit quand la faute d’excès de pouvoir est reconnue.  Le département sait parfaitement tout cela car quand j’ai porté mon dossier à la direction des ressources humaines, une de mes anciennes collègues très expérimentées qui travaille à la gestion des carrières et a travaillé avant au service paye, me l’a confirmé de vive voix.

 

Au sujet des retraites, vous remarquerez que dans l’affaire de l’emploi fictif de Madame Dugoin, les juges, qui ont jugé irrecevable la requête du Département concernant le remboursement des salaires versés illégalement, n’en ont pas moins accordé au département de l’Essonne le remboursement des cotisations de retraite pour ne pas léser le contribuable essonnien (P.J. n° 1).  Il n’est donc absolument pas surprenant que les juges du Tribunal Administratif de Versailles m’aient accordé par leur méthode de calcul la reconstitution de ma retraite, puisqu’ils ont jugé ma requête recevable et fondée.  

 

Il est assez mal venu au département de ne pas avoir effectué le paiement des cotisations de retraite.  Les annuités de retraite que j’ai perdu du fait de mon licenciement illégal sont impossibles à récupérer, chacun n’a qu’un nombre limité d’années à travailler, on ne peut jamais rattraper les années perdues.  De plus pour obtenir une retraite, il faut avoir cotisé un nombre suffisant d’années.

 

 

Concernant le fondement du jugement et le comportement du Département de l’Essonne.

 

Indépendamment de la mauvaise lecture et interprétation du jugement, on ne peut ignorer qu’un jugement est fondé sur des principes et textes de droit.  L’exécution du jugement, telle qu’elle a été faite, est totalement incohérente et basée sur aucun principe de droit.  C’est d’ailleurs pour cela que ce n’est que plus de 10 mois après la notification de jugement, que je reçois le premier document concernant l’interprétation qu’il en a été fait.   Si le département avait été sûr de son interprétation du jugement, il m’aurait immédiatement envoyé le détail des calculs effectués pour déterminer l’indemnité et éventuellement les raisons de ces méthodes.

 

J’ai expliqué dans mon courrier du 3 juin 1999, puis dans mon mémoire en appel du 20 août 1999 certaines raisons qui ont pu motiver les juges à rendre un tel jugement, et j’ai présenté les textes de droit qu’ils ont pu utiliser pour établir et rédiger le jugement.  Le Département de l’Essonne n’a d’ailleurs pas fait une mauvaise interprétation, mais deux mauvaises interprétations puisqu’il a effectué les paiements en plusieurs fois et que vous avez été obligé de le relancer par courrier pour lui demander l’exécution totale du jugement. 

 

Je souhaiterais enfin faire remarquer comme je l’ai déjà fait dans mon mémoire du 20 août 1999, que cette mauvaise interprétation a pour conséquence, bien sûr, de diminuer la responsabilité du Département dans les fraudes graves décrites par le rapport de la Cour des Comptes, mais aussi celle de M. Dugoin qui sera jugé en appel le 24 septembre 1999 et qui est toujours conseiller général du Département de l’Essonne et sénateur maire.  Et à contrario, elle aggrave ma responsabilité dans ces fraudes et me crée un nouveau préjudice, ce qui est totalement injuste puisque j’en suis (et continue d’en être) la première victime.  

 

 

En Conclusion.

 

            Conformément à l’article R 222 – 3 du Code des Tribunaux Administratifs et Cours Administratives d'Appel auquel vous faites référence dans votre courrier, je sollicite une procédure juridictionnelle pour obtenir l’exécution complète du jugement.  C’est à dire, le paiement de l’indemnité basée sur les salaires que j’aurai du touché jusqu’à l’exécution totale du jugement (soit 403 426 FF + intérêts + intérêts de retard – (138 815,37 FF) sommes déjà versées) et la reconstitution de la retraite jusqu’à la date d’exécution totale du jugement (paiement des cotisations aux organismes de retraite).   Cette exécution totale mettra un terme au contrat. 

 

Je sollicite aussi la condamnation du Département de l’Essonne au paiement d’une astreinte pour obtenir cette exécution totale rapidement car mon préjudice est aggravé par ce retard.  D’autre part, les juges de la Cour d’Appel de Paris devraient pouvoir l’intégrer dans leur jugement concernant l’appel de M. Dugoin car il aggrave sa responsabilité et celle du Département de l’Essonne, partie civile en première instance, dans les fraudes.

 

            En vous remerciant par avance, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la Cour Administrative d’Appel de Paris, l’expression de mes sentiments distingués.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pièce jointe.

 

P.J.  n° 1:  Extrait du jugement n° 106 du Tribunal Correctionnel d’Evry concernant les fraudes de M. Dugoin.